1978-1989

  • Strandgut des Krieges
    165x231 - 1978
    (paille, sable, tissu, sur bois)

Peinture non-plane

Mentionnons des recherches comme celles qui commencent autour du Bauhaus et que Domela a poursuivies. Marqués par le point de départ cubiste dont ils se sont beaucoup moins éloignés qu’il ne croyaient, Constructivistes et Dadaïstes ont posé les prémices d’un langage qui a ressurgi avec les Nouveaux Réalistes (Klein, Arman, Christo, Spoerri) auxquels on peut rattacher Marial Raysse, Jean-Pierre Raynaud, Eric Dietman et, très proches d’eux à l’origine, le courant pop et néo-dadaïste américain (Rauschenberg, Oldenburg, Kienholz). L’influence de Dubuffet, avec son apologie de l’art brut, a mis en évidence les procédés matiéristes des artistes naïfs. Les premiers actes de violence contre le support traditionnel de la toile (lacérations, etc.) et l’apport de matériaux naturels (terre, sable, planches) furent le fait d’artistes œuvrant à ce moment-là dans le cadre de l’abstraction, comme Tàpies ou Georges Noël suivis plus tard par les développements figuratifs comme ceux de Reyberolle.
De toutes ces influences procède la richesse actuelle dans le domaine de la peinture non-plane. Mais les considérations historiques ont une faible capacité à faire saisir l’attrait du peintre pour les matériaux hétérogènes qu’il va tenter d’intégrer à son œuvre. S’il a choisi cette façon brutale de faire pénétrer le monde extérieur dans son monde mental par le biais d’un hasard volontaire, c’est parce que les matériaux vont le contraindre à modifier ses schémas et toute sa codification : ainsi l’épaisseur d’un relief créant une ombre portée modifie la couleur, entraîne à diminuer son importance jusqu’à la solution possible de la monochromie.
En perturbant l’ordre illusionniste, cette technique met en relation deux codes contradictoires : l’un de représentation plane ; l’autre de matérialisation spatiale, qui débouche sur la notion de temps. Espace du naissant pour reprendre une expression qui donne l’idée de durée, non pas seulement parce que les éléments se dégagent de la paroi en bas-relief, mais plutôt parce que le peintre se connaît comme celui qui tire la forme du néant.
T. S. 1984